YouTube troque le respect du droit d’auteur contre la publicité
Publié le jeudi 7 juin 2012YouTube troque le respect du droit d’auteur contre la publicité
YouTube autorise désormais l’utilisation de pistes protégées par le droit d’auteur dans les vidéos des utilisateurs. Mais en échange, la plate-forme va placer des publicités pour rémunérer les ayants droit. Le système n’est pas neuf et n’est pas sans évoquer une licence globale privatisée.
Depuis 2007, YouTube propose aux créateurs un programme de rémunération qui s’appuie sur les publicités AdSense. Avec ce système, chaque membre du club des partenaires et des créateurs a la possibilité de décider pour chacune de ses œuvres s’il souhaite ou non la présence d’annonces. S’il est d’accord, il reçoit une part des revenus publicitaires générés par les vidéos.
La plate-forme américaine est toutefois parfaitement consciente de l’exploitation par d’autres de contenus protégés par le droit d’auteur. Des chansons servent ainsi à sonoriser des clips amateurs, sans que ceux ayant mis au monde ces titres ne soient rémunérés. Cet usage se voit notamment dans les reprises de morceaux ou dans les clips AMV. Et ces créations ont parfois beaucoup de succès.
YouTube étant un service dont l’essentiel du contenu est fourni par les utilisateurs, il est contre-productif de supprimer les comptes des indélicats à tour de bras ou de désactiver purement et simplement la bande son. Cela risquerait de pousser de nombreux internautes à aller voir ailleurs. Mais dans le même temps, Google est pressé par les maisons de disques qui veulent voir leurs droits respectés.
Google a donc passé un accord avec plusieurs ayants droit afin de trouver une solution consensuelle. Les utilisateurs pourront utiliser des musiques dont les droits sont gérés par les majors, à condition qu’ils acceptent la diffusion de publicités au lancement de la vidéo. Les revenus générés par ces annonces seront ensuite partagés entre la firme de Mountain View et les maisons de disques.
Dans cette configuration, l’utilisateur ne touchera rien. Il n’est pas considéré comme un créatif, donc il ne peut pas profiter de la moindre somme générée par les vidéos envoyées sur le service. La seule façon de toucher de l’argent est de devenir membre du club et de suivre à la lettre les consignes édictées par la firme de Mountain View. Et celles-ci sont très strictes.
Ce mécanisme n’est toutefois pas vraiment nouveau. Dans une autre actualité, nous avions par exemple évoqué le cas de cet utilisateur ayant envoyé des vidéos de chants d’oiseaux. Or, la plate-forme l’a prévenu qu’il utilisait du contenu protégé par Rumblefish. L’infraction a été repérée par le filtre Content ID de Google, qui distingue les contenus des ayants droits.
Mais plutôt que de réclamer la suppression des vidéos qui reprennent son contenu, Rumblefish propose aux membres de YouTube d’afficher des publicités. Les revenus alors générés sont ensuite partagés entre Google et Rumblefish, au nom du paiement de la licence d’exploitation de la chanson.
Sur le plan contractuel, le système mis en place par Google est tout à fait normal. Mais sur le plan des symboles, du point de vue de l’utilisateur final, c’est différent. Le principe actuel du droit d’auteur est un régime d’autorisation préalable. Or, Google met en place un régime d’autorisation a posteriori, grâce à la publicité. D’une certaine manière, la logique du droit d’auteur n’est pas respectée.
Autrement dit, l’internaute fait ce qu’il veut sans demander à qui que ce soit pourvu qu’il accepte d’afficher de la publicité. D’une certaine manière, il s’agit là d’une forme de retour aux origines du droit d’auteur. Avant l’avènement d’Internet et du P2P, qui a changé la donne, le droit d’auteur était un droit qui régissait exclusivement les relations entre professionnels.
Les consommateurs n’étaient pas concernés et n’avaient pas à comprendre les subtilités parfois très complexes du droit de la propriété intellectuelle. En ne donnant plus à l’internaute la charge de savoir s’il viole ou non des droits, YouTube revient – pour des raisons évidemment mercantiles – à un certain bon sens. C’est d’une certaine façon la privatisation de la licence globale, en remplaçant la taxe par de la publicité.
Sources : numerama.com