L’efficacité pédagogique en formation des adultes : une feuille de route pour l’IEEPI
Publié le mardi 18 mars 2025
Dans un monde où l’apprentissage tout au long de la vie est devenu une nécessité, la formation des adultes ne peut pas se résumer à une simple transmission de connaissances. C’est un véritable métier, qui repose sur des compétences solides, des savoir-faire éprouvés et une approche pédagogique rigoureuse.
À l’IEEPI, nous avons à cœur de structurer notre modèle pédagogique autour des meilleures pratiques en matière d’efficacité pédagogique. Mais…
Qu’est-ce qui fait réellement l’efficacité d’une formation pour adultes ?
Anne Grouselle, Directrice générale de l’IEEPI, décrypte les déterminants et facteurs clés d’un modèle de formation efficace et partage les ambitions de l’IEEPI pour les années à venir.
Qu’est-ce qui définit une formation efficace pour adultes ?
Former des adultes, c’est relever un défi permanent : garantir l’acquisition de compétences, tout en tenant compte des parcours, des attentes et des contraintes spécifiques de chaque apprenant.
L’efficacité pédagogique repose sur une ingénierie précise, qui doit répondre à plusieurs enjeux :
- Assurer un apprentissage durable et transférable en situation de travail.
- Adopter des méthodes adaptées à la diversité des profils et des besoins.
- Intégrer des approches innovantes tout en gardant une exigence de pertinence et de pragmatisme.
Quels sont les leviers essentiels de l’apprentissage adulte ?
Dans un environnement saturé d’informations, capter et maintenir l’attention est un défi, car l’attention est devenue une ressource précieuse et menacée. Une formation efficace mise sur des techniques favorisant l’engagement actif, la stimulation de la curiosité et des formats interactifs qui évitent la surcharge cognitive.
Un adulte apprend quand il en perçoit l’intérêt concret. Ainsi, la motivation, moteur de l’apprentissage, repose sur plusieurs leviers :
- Le sens et l’utilité : l’apprenant doit voir un lien direct avec ses enjeux professionnels.
- Le sentiment d’efficacité : multiplier les petites réussites pour renforcer la confiance.
- L’autonomie : favoriser des parcours individualisés où l’apprenant devient acteur de sa formation.
Mais pour apprendre efficacement, encore faut-il savoir apprendre. C’est là qu’interviennent la métacognition et l’autorégulation. Un bon dispositif de formation ne se limite pas à transmettre des savoirs, il doit aussi aider l’apprenant à mieux comprendre comment il apprend :
- Prendre conscience de ses propres stratégies d’apprentissage et les ajuster en fonction des résultats.
- Identifier ses forces et ses axes d’amélioration, pour mieux surmonter ses freins et ses difficultés.
- Adopter une posture proactive face aux apprentissages, en développant sa capacité à rechercher l’information, à structurer ses connaissances et à apprendre en autonomie.
En intégrant ces dimensions, la formation devient plus qu’un simple transfert de savoirs : elle devient un véritable levier d’autonomie et de performance durable pour l’apprenant.
Quelles approches pédagogiques privilégier ?
C’est une porte ouverte enfoncée que de dire qu’on ne forme pas un enfant comme on forme un adulte. D’ailleurs, on parle de pédagogie pour adultes. Mais en réalité, on devrait parler d’andragogie.
Ainsi, le terme pédagogie, issu du grec paidagōgia (país = enfant, agōgos = guider), désigne historiquement l’art d’enseigner aux enfants, avec une approche essentiellement descendante, où le formateur joue un rôle central dans la transmission du savoir. Littéralement, il s’agit de « conduire l’enfant » vers la connaissance.
Par « opposition », l’andragogie, du grec andragōgia (anēr, andros = homme adulte), s’attache aux méthodes spécifiques d’apprentissage destinées aux adultes. Contrairement aux enfants, les adultes ne partent pas de zéro : ils possèdent une expérience, des savoirs préalables et une autonomie, qui influencent profondément leur manière d’apprendre. (Une fois dit cela, on retient par simplicité le terme pédagogie plutôt qu’andragogie quand il s’agit de parler de formation pour adultes).
Or, cette richesse d’expériences s’accompagne aussi de biais cognitifs, c’est-à-dire de mécanismes mentaux inconscients qui peuvent soit faciliter, soit perturber l’apprentissage. Un adulte interprète de nouvelles informations à travers le prisme de ce qu’il connaît déjà, ce qui peut générer des résistances au changement, des raccourcis cognitifs, ou même des certitudes difficiles à remettre en question. Ces biais peuvent aussi influencer la relation entre celui qui enseigne (teach) et celui qui apprend (learn), nécessitant une approche différente :
- Valoriser les expériences passées tout en aidant à questionner certains automatismes.
- Favoriser l’apprentissage par l’action plutôt que par une transmission purement théorique.
- Créer un cadre de formation où l’apprenant est actif et impliqué, plutôt que simple récepteur d’un savoir.
C’est pourquoi, en formation pour adultes, il ne s’agit pas seulement de transmettre des connaissances, mais d’accompagner l’apprenant dans l’appropriation, la remise en question et la mise en pratique de ces savoirs.
C’est pourquoi la formation pour adultes repose sur des méthodes adaptées aux adultes. L’efficacité passe alors par une ingénierie pédagogique qui varie les approches :
- Apprentissage actif : simulations, études de cas, mises en situation.
- Feedback régulier : un levier puissant pour ajuster et progresser.
- Blended learning et multimodalité : alterner présentiel, distanciel et travail collaboratif.
Comment transformer une formation en compétence durable ?
Former ne suffit pas. Il faut transformer l’apprentissage en compétences opérationnelles, applicables et évolutives. Une formation efficace ne se mesure pas uniquement à la satisfaction des participants ou aux connaissances théoriques acquises, mais à la capacité des apprenants à mobiliser et transférer ces savoirs en situation réelle.
Les facteurs clés d’une montée en compétence réussie sont intimement liés au projet de l’apprenant et à la contextualisation de son apprentissage dans son quotidien professionnel.
Ainsi, la compétence ne se construit pas uniquement en salle de formation. Elle se forge dans l’action, par la mise en pratique des savoirs. Des mises en situation réelles, des projets concrets et des retours d’expérience permettent de renforcer l’ancrage des apprentissages.
Par ailleurs, la formation doit être soutenue par l’entreprise, qui doit créer un environnement favorable au développement des compétences. Cela passe par un management impliqué, des opportunités de montée en compétences et un suivi post-formation pour garantir l’application des acquis.
L’acquisition d’une compétence ne se décrète pas : elle se construit dans la durée. Des temps de retour d’expérience, de mentorat ou de formation continue doivent être intégrés pour éviter que les acquis ne s’érodent et pour favoriser l’évolution des compétences en fonction des besoins du métier. Ce qui est appris doit être reconnu et utilisé. La reconnaissance des compétences via des certifications, des badges numériques ou une validation interne contribue à motiver les apprenants et à légitimer l’investissement en formation.
Ainsi, l’efficacité pédagogique ne s’arrête pas à l’acte de former : elle doit s’étendre au développement durable des compétences et à leur reconnaissance dans le parcours professionnel.
Comme on le sait, apprendre coûte, savoir vaut. Une formation réussie ne se mesure pas uniquement en heures dispensées, mais en valeur créée pour l’individu et pour l’entreprise. C’est pourquoi il est essentiel que l’ensemble du processus de formation, depuis l’ingénierie jusqu’à l’évaluation, soit pensé dans une logique de création de valeur, où chaque apprentissage contribue à une meilleure performance, une plus grande autonomie et une véritable capacité d’innovation.
À l’IEEPI, nous sommes convaincus que la formation ne doit pas se limiter à la transmission de savoirs, mais doit avant tout permettre d’agir, de faire, de décider. Aujourd’hui, l’accès à l’information est immédiat : en quelques clics, chacun peut accéder à une infinité de contenus, de théories et de connaissances. Mais savoir n’est pas savoir-faire. Ce qui fait la différence, c’est la capacité à appliquer, à mobiliser les bonnes méthodes, à prendre des décisions éclairées dans un contexte donné.
C’est pour cela que nos formations privilégient les approches basées sur l’expérience, l’échange et la mise en pratique : études de cas, simulations, ateliers collaboratifs, partage d’expériences… Nous mettons l’accent sur le comment et le pourquoi : comment faire ? (les méthodes), pourquoi faire ? (la stratégie). Parce que la vraie valeur d’une formation, c’est ce qu’on en retient et surtout ce qu’on est capable d’en faire.
Comment l’IEEPI structure son modèle pédagogique pour l’avenir ?
À l’IEEPI, nous faisons de la formation un levier stratégique de croissance et de compétitivité.
C’est pourquoi, en 2024, nous avons initié une série d’ateliers de design pédagogique, réunissant plusieurs intervenants volontaires, pour réfléchir ensemble à l’évolution et à la consolidation de notre modèle pédagogique.
Ces ateliers ont permis d’explorer plusieurs axes stratégiques pour enrichir et consolider notre modèle pédagogique :
- Évolution du modèle de formation : innover, différencier et individualiser les parcours d’apprentissage.
- Modalités pédagogiques et animation : renforcer l’efficacité, l’engagement et l’interactivité des sessions.
- Contenus et supports : garantir la pertinence, l’adaptabilité et l’accessibilité des ressources mises à disposition.
- Méthodes d’évaluation et suivi des compétences : diversifier les approches, encourager l’implication des apprenants et structurer l’évaluation selon une logique S.M.A.R.T (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste, Temporellement défini).
- Usages des outils didactiques et innovations technologiques : intégrer intelligemment le digital pour enrichir les apprentissages sans dénaturer l’humain.
Ces réflexions nourrissent notre ambition : proposer des formations toujours plus adaptées aux besoins des professionnels, en conjuguant savoir-faire, méthodologie et impact concret.
Nous tenons à remercier chaleureusement tous les intervenants qui ont contribué à cette démarche, en partageant leurs retours d’expérience et en co-construisant avec nous les bases d’une pédagogie toujours plus efficace et engageante.
Un guide de bonnes pratiques pour structurer notre pédagogie
De ces échanges riches et stimulants émergera un guide de bonnes pratiques pédagogiques et didactiques, destiné aux intervenants de l’IEEPI. Ce guide, dont la publication est prévue courant 2025, viendra structurer et renforcer notre modèle de formation, en garantissant une homogénéité des approches et une amélioration continue de nos dispositifs pédagogiques.
Plus qu’un simple document, il sera une boussole pour nos formateurs et un atout supplémentaire pour accompagner durablement la montée en compétences de nos apprenants.
Illustration : Licence Creative Commons