« Allo quoi » de Nabilla peut-il vraiment être déposé à l’INPI ?
Publié le jeudi 11 avril 2013« Allo quoi » de Nabilla peut-il vraiment être déposé à l’INPI ?
Peut-on vraiment déposer un slogan de ce type à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) ? La question est permise, puisque les termes « Allo quoi », « Allo non mais allo quoi », ainsi que la phrase « Allo ! T’es une fille t’as pas de shampoing, c’est comme si je dis t’es une fille t’as pas de cheveux », ont fait l’objet d’une demande de protection juridique.
La starlette Nabilla Benattia, héroïne de l’émission « Les Anges de la téléréalité », diffusée sur la chaîne de télévision NRJ 12, et sa société de production, « La Grosse Equipe », sont à l’origine de ces demandes.
Ils souhaitent que les noms soient protégés pour toute une série de produits et services, numérotés par classes : la classe 9 désigne les appareils et instruments scientifiques, la classe 16 les produits de l’imprimerie, la 18 le cuir et les imitations, la 24 les tissus, la 25 les vêtements et chaussures, la 26 les dentelles et broderies, la 35 la publicité…
Si la SARL La Grosse Equipe lance une marque de sacs à main, elle pourra l’appeler « Allo quoi ».
Elle a même enregistré un nom de livre: « Allo Nabilla la vraie vie de la famille Benattia ».
Elle a pensé à tout…
L’INPI indique que si personne ne fait opposition dans un délai de trois mois, les marques seront « enregistrées ».
Me Antoine Chéron, avocat et docteur en droit de la propriété intellectuelle, pense que cela ne devrait pas poser de problème.
Il rappelle que, selon le code de la propriété intellectuelle (article L.711-2), une marque doit être composée d’un « signe distinctif ». Elle ne doit être ni « descriptive », ni « déceptive » (trompeuse).
Le signe distinctif ne doit pas non plus être « générique ». Exemple : une marque de voiture ne peut pas s’appeler « voiture ». Mais une marque de parfum en a le droit.
En outre, Me Chéron précise que « le signe verbal d’une marque peut prendre la forme d’un ensemble de mots, existants ou non » : « Il est ainsi admis qu’un slogan peut constituer une marque, sous réserve qu’il ne se borne pas à promouvoir des produits ou services en termes courants. »
La marque, enfin, ne doit pas non plus porter atteinte aux bonnes mœurs – elle ne peut s’appeler « Cannabis », par exemple.
La jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne autorise l’utilisation d’un slogan pour une marque « à condition que le signe permette au public pertinent de mémoriser facilement et immédiatement le syntagme en tant que marque distinctive pour les produits ou services désignés ».
« Les termes de la phrase « Allo ! T’es une fille t’as pas de shampoing, c’est comme si je dis t’es une fille t’as pas de cheveux », pris séparément, sont tous les mots usuels du langage courant ce dont il résulte que la marque est protégeable mais présente toutefois un caractère distinctif relativement faible », observe Me Chéron.
« Pour certaines catégories telles que la téléphonie, ils peuvent être considérés comme descriptifs. » Autrement dit, il pourrait être difficile d’appeler « Allo » une marque de téléphonie.
« En revanche, dans la mesure où d’autres mots possédant un caractère arbitraire au regard des produits ou services enregistrés sont ajoutés au signe, cette marque pourra être considérée comme protégeable », indique Me Chéron.
Nabilla Benattia et La Grosse Equipe ne pourront pas interdire à leurs concurrents « d’utiliser les termes usuels choisis de façon séparée et indépendante. Ils pourront seulement s’opposer à leur utilisation sous la forme de la combinaison spécifique telle qu’enregistrée auprès de l’INPI ».
Ils pourraient donc s’opposer à l’utilisation d’une marque « Allo ! t’es pas une fille et t’as du shampoing? » sans pouvoir empêcher un concurrent d’utiliser notamment la marque « Allo » ou la marque « Fille »…
Sources : Le Monde